Dissolution de la Fédération malienne de football : Le Mali bientôt suspendu de toutes les compétitions internationales !

Le ministre des sports, Housséyni Amion GUINDO, a dépêché ce jeudi le Directeur national des Sports, accompagné d’huissiers et d’une escouade de policiers anti-émeutes et prêts à en découdre, pour fermer et sceller les bureaux de la Fédération Malienne de Football, FEMAFOOT. Cette initiative, assez extrême et radicale, est consécutive de la décision N°0011/MS-SG, datée de la veille prise ce mercredi 8mars 2017, ‘’portant dissolution de l’organe directeur de la Fédération Malienne de Football et mise en place d’un comité provisoire’’. La décision de dissoudre le comité exécutif de la FEMAFOOT, à en croire le Ministre Guindo, est fondée sur la situation de crise au sein du football malien.

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Une mesure extrême et dangereuse

Interrogé par des confrères, quant à sa réaction face à cette mesure, le Président de la FEMAFOOT, Boubacar Baba DIARRA, a assuré ne pas avoir de réaction particulière car, d’après lui, il s’agissait d’une décision ministérielle prise par une instance hiérarchique administrative élevée et que du fait de son rang d’officier supérieur de la Police, il ne s’autorisait aucun commentaire à faire.

Mais selon différents recoupements, la décision N°0011/MS-SG, du mercredi 8mars 2017, constitue à la fois dans le fond que dans la forme, une violation systématique de toutes les règles régissant le football, tant pour le décret réglementant les relations Etat-FEMAFOOT, que celles en vigueur au sein de la FIFA et la CAF.

Déjà, au niveau national, le décret régissant la délégation de gestion du football à la FEMAFOOT ne comporte aucune disposition relative à la crise, qui n’est pas susceptible de constituer un motif de dissolution de la fédération malienne. Par ailleurs, dans les faits, peut-on parler de crise même au sein du football, dès lors que les frondeurs n’avancent aucun argument juridique susceptible de fonder leurs revendications au point d’ôter toute légalité juridique à l’existence même de l’actuel comité exécutif. Qu’à cela ne tienne, du moment que ces mêmes frondeurs qui ont le soutien manifeste du Ministre, la dissolution actuelle est une mesure qu’ils ont demandé aux autorités de l’Etat qui viennent d’y répondre favorablement, du moment donc que ces frondeurs ont eux-mêmes attaqué la FEMAFOOT devant le TAS, pourquoi n’avoir pas attendu donc le verdict du tribunal sportif qui interviendra dans moins de deux mois ? Cette précipitation de Housséyni Guindo, et de ces deux mentors, le Président de la République et le Premier Ministre dont il assure avoir reçu l’ordre de dissolution, cacherait-il l’issue du verdict du TAS ?

Une décision immature et irresponsable

Il faut comprendre que sauf cas de faute lourde, comme détournements financiers avérés, ni la FIFA ni la CAF ne sauraient se satisfaire d’une telle argutie. Au demeurant, la décision assure que le Ministre se propose de mettre en place un comité provisoire qui, pendant les douze prochains mois, s’occupera de gérer les affaires du football. Ce qui constitue une hérésie administrative d’autant que dans les textes, seules les instances nationales du football, ligues, clubs et associations de football ou les internationales sont habilitées à mettre ce genre de comité en place. Qui plus est, seuls les membres de l’actuel comité exécutif dissout, peuvent en être membres. Or, le ministre Guindo a pris sa décision sans consulter aucune de ces structures, n’avançant comme seul appui que c’est le Président de la République lui-même qui lui en aurait donné l’ordre expresse. On attend de voir… Encore de toute façon une preuve de l’immaturité de ce ministre qui n’est visiblement pas le mieux conseillé parmi ses pairs, même si l’on s’étonne que les plus hautes autorités lui laissent les mains libres d’agir à sa guise, en violation des textes régissant le domaine, car le Ministre Guindo n’en est pas à une première.

Dans tous les cas, comme il faut s’y attendre, la FIFA et la CAF ne manqueront pas de réagir par des mesures conservatoires de suspension du Mali de toutes compétitions internationales de football, à commencer ce week-end par la non-participation du Djoliba et des Onze Créateurs de Niaréla, qui devaient croiser le fer en Coupe CAF. Par la suite, les Aiglonnets, qui devaient s’engager en Coupe d’Afrique des Nations de leur catégorie en Avril prochain au Gabon, devraient probablement remiser leurs crampons au clou. Il en sera de même pour les Aigles séniors qui entrent en compétition le 6 juin prochain contre le Gabon à Bamako, dans le cadre des éliminatoires de la CAN Cameroun 2019. Quant aux éliminatoires de la coupe du monde Russie 2018, il va s’en dire qu’en dépit des maigres espoirs de qualification, il faudrait se résoudre à y faire une croix ! Bref, le Ministre Guindo vient d’ouvrir une boîte de Pandore ; reste à savoir ce qui va en sortir.

Cette décision n’est en réalité pas une surprise, car depuis le mois d’octobre de l’an dernier, le Ministre des Sports a toujours menacé d’y recourir pour, a-t-il toujours assuré, résoudre ce qu’il considère, les frondeurs avec lui, comme une crise. A cet effet, il avait lui-même pris l’initiative de se rendre à Genève au siège de la FIFA, pour soumettre la question à l’instance internationale du football. Mme Fatma SAMOURA, la secrétaire générale de la FIFA, n’avait accepté de le recevoir qu’après que le Président de la FEMAFOOT en ait fait la demande expresse au motif qu’il s’agissait d’un représentant de l’Etat. Mais mal lui en avait pris puisqu’il y avait été proprement éconduit avec, en prime, la recommandation très explicite qu’au cas où il s’avisait de toucher au Comité exécutif de la FEMAFOOT, le Mali serait suspendu de toutes les compétitions internationales, dans les heures qui suivent et que dans le cas d’espèce, le Mali ne représentait que peu de chose, parmi les quelques 211 ou plus associations de football composant la FIFA.

Un désir obsessionnel

Un temps refroidi, le Ministre Guindo avait de nouveau brandi cette menace à la suite de l’assemblée extraordinaire de la FEMAFOOT, organisée le 28 Novembre dernier à Sikasso, la capitale du Kénédougou, à la suite d’une recommandation de la FIFA et en exécution de la sentence du Tribunal arbitral des sports, TAS, qui avait, suite à sa saisine par les frondeurs, demandé à l’instance fédérale malienne, de tenir cette session avant le 29 novembre pour statuer sur leur cas. On se le rappelle, cette assemblée générale avait été boycottée par les frondeurs donnant du coup prétexte au Ministre des Sports pour relancer son obsession. Seulement voilà, l’assemblée générale de Sikasso avait été supervisée à la fois par la Confédération africaine de football, CAF, et par la FOFA elle-même qui avaient, les deux instances, dépêché leurs représentants.

Mais l’opinion ignore qu’en dépit des raisons de droit et autres arguments de bon sens, Housséyni Amion Guindo, n’a jamais renoncé à vouloir dissoudre la FEMAFOOT. Et pour cause, à la veille de la CAN Gabon 2017, il avait assuré que quel que soit le résultat, il procéderait à cette dissolution. Mais le calendrier des compétitions a voulu que cette initiative risquait de compromettre la participation du Mali à la CAN junior en cours en Zambie. Aussi a-t-i pensé qu’avec la sortie précoce des Aiglons de cette compétition, le moment tant attendu était venu de prendre enfin cette décision et de rendre gorge à un comité exécutif qui faisait de la résistance depuis trois ans déjà.

Mais au-delà de ces éventuelles conséquences, cette décision du Ministre Guindo est révélatrice de la déliquescence administrative en cours au Mali.

Anthelme DEMBELE

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