Problématique de l’esclavage par ascendance au Mali 874 cultivateurs empêchés de travailler sur leurs terres dans la région de Kayes

Les locaux du Mémorial Modibo Kéïta ont abrité, le samedi 3 août dernier, une causerie-débat organisée par la Plateforme  » Benbere  » regroupant la communauté des blogueurs du Mali. Placée sous le thème  » Esclavage dans la région de Kayes, tabou, déni, bilan de la lutte et perspective  » cette activité entre dans le cadre d’un programme dénommé  » Benbere Benkan  » permettant à la plateforme de poser chaque année une problématique de la société malienne.

Pour la circonstance, un panel composé du Coordinateur de la Plateforme « Benbere »Abdoulaye Guindo, un membre de la Commission Nationale des Droits de l’homme (CNDH), Dary Sacko et le porte-parole des ex-esclaves, Simbala Coulibaly, a été mis en place. Selon Abdoulaye Guindo, l’idée d’organiser ce débat est venue du fait que depuis un certain temps, la région de Kayes est sous le feu des projecteurs en raison de la situation très préoccupante vécue par les descendants d’esclaves. Ces derniers vivent dans le dénuement le plus total. En effet, il y a lieu de rappeler qu’à ce sujet, la Commission Nationale des Droits de l’Homme dont les agents ont effectué une mission dans la zone a récemment indiqué que 1153 personnes déplacées à cause de leur statut social, ont débarqué dans la localité de Mambri, une commune rurale du Cercle de Kita dans la région de Kayes. Parmi elle figurent 534 hommes, 619 femmes  et 720 enfants qui, selon les témoignages recueillis, sont victimes de l’esclavage par ascendance dans les communes rurales de Dindanko, Djougoun et Guémoucouraba du même Cercle.

A en croire le représentant de ces ex-esclaves, Simbala Coulibaly, 874 cultivateurs ont été empêchés de travailler sur leurs terres dans la région de Kayes cette année à cause de leur classe sociale. Alors que l’année passée, ils étaient plus de 1000. Une situation qui risque d’entrainer une sévère crise alimentaire.

D’autres intervenants ont également affirmé que les personnes victimes de ces pratiques sont régulièrement soumises à des violations de leurs droits les plus élémentaires. Lesquels sont liés entre autres à la dépossession des terres, l’atteinte à l’intégrité morale et physique, l’injustice, l’abus de pouvoir. C’est ainsi qu’ils ont interpellé l’Etat afin qu’il s’assume en adoptant des mesures mettant fin à cette pratique et ses séquelles.

Par ailleurs, d’autres témoignages, encore plus émouvants les uns et les autres ont été faits. A en croire Baté Sissoko : « Pendant des fêtes, ta femme ne t’appartient pas ! Elle passe 3 jours dans des travaux ménagers dans une autre famille ». Youssouf Sissoko de renchérir qu’après avoir refusé de se soumettre à l’esclavage, il a échappé à une tentative de meurtre grâce au Procureur de Kayes. Aujourd’hui, il vit à Nioro pour éviter de se faire agresser.

Selon Dary Sacko de la CNDH, la pratique de l’esclavage est une violation des droits de l’Homme. Avant de préciser qu’elle viole également le préambule de la Constitution du Mali ainsi que tous les textes ratifiés tels que la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

Invité à prendre la parole pour la circonstance, le Pr Clément Dembélé, président de la Plateforme de lutte contre la corruption et le chômage au Mali, a exprimé son indignation et son incompréhension de voir la persistance de ces pratiques au Mali et au 21e siècle. Pour lui, il est aussi important de mêler les leaders d’opinion au niveau des communautés dans cette lutte visant à mettre un terme à la pratique de l’esclavage.

Il a de même insisté sur la nécessité d’impliquer toutes les forces vives ainsi que les moyens de communication pour dénoncer cette pratique afin que l’Etat prenne ses responsabilités.

Massiré DIOP

Source: l’Indépendant

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