Sortie de crise : Boubou Cissé, le fusible qui ne saute pas !

À peine le Sommet extraordinaire de la CEDEAO terminé, lundi, on a été plus que surpris de la formation d’un mini gouvernement par Ibrahim Boubacar Keita et son Premier ministre Boubou Cissé. Au motif que l’État ne doit pas être bloqué, le président de la République a annoncé la nomination de 6 ministres avec le maintien de 3 ministres sortants et l’arrivée de 3 nouveaux. Boubou Cissé abandonne son portefeuille de l’Economie et des Finances.

La confirmation de Tiébilé Drammé au ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, tout comme celles du Général Dahirou Dembélé à la Défense et aux Anciens combattants et de Boubacar Alpha Bah à l’Administration territoriale et à la Décentralisation, avec l’arrivée de Abdoulaye Daffé au ministère de l’Economie et des Finances, Kassoum Tapo à la Justice, et le Général Bamba Moussa Keita à la Sécurité intérieure, donnent comme signal à l’opinion nationale la volonté affirmée d’aller en avant malgré la situation générale de crise qui n’a toujours pas évolué. Et ce, en dépit des résolutions de la CEDEAO, d’ailleurs rejetées par le Comité stratégique du M5-RFP, qui juge les conclusions du Sommet extraordinaire «ni conformes aux attentes du peuple malien ni à notre constitution.» La formation de ce mini cabinet, au-delà de sa composition, donne le signal d’un empressement, d’une précipitation, si ce n’est celui d’une méprise totale quand bien même les recommandations de la CEDEAO sonnent comme une approbation des récriminations du front de la contestation en légitimant son mémorandum.
Le maintien de Boubou Cissé par le président IBK comme Premier ministre est une gifle au M5-RFP, qui dénonce les morts des manifestations de juillet et sur lesquelles, les chefs d’État de la CEDEAO demandent que toute
la lumière soit faite.
Il faut rappeler que ces morts sont intervenues alors que l’État malien se résumait à deux personnes, à savoir le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, et son Premier ministre, Boubou Cissé. Donc, en dehors d’eux, difficile de trouver un autre responsable étatique.

Le Général Salif Traoré va-t-il porter la responsabilité des tueries ?
Au lieu de se servir de Boubou Cissé comme fusible, le président de la République en fait ainsi un fétiche qui va concentrer toutes les rancœurs des populations et particulièrement des leaders du M5-RFP, qui font de l’enquête sur
les tueries un nouveau cheval de bataille. Et c’est peut-être ainsi qu’il faut comprendre le remplacement du Général Salif Traoré par le Général Bamba Moussa Keita à la tête du département de la Sécurité intérieure.
Dans les tueries de juillet, on parle beaucoup de la Force spéciale antiterroriste sous la responsabilité unique du ministre de la Sécurité, suivant le décret de création de cette unité dont le premier commandant n’hésitait pas à dire
que «la Forsat est là pour tuer», lors de la prise d’otage sanglante de Radisson Blu. Salif Traoré, va-t-il donc être présenté aux yeux de l’opinion nationale et internationale comme le responsable des tueries, lors même que ces événements malheureux ont eu lieu presqu’un mois après la démission collective du gouvernement déposée par Boubou Cissé et acceptée par le président de la République, qui a aussitôt reconduit le Premier ministre ?
Mais, au-delà de ces considérations politiques, le mini cabinet de Boubou Cissé souffre d’emblée de deux tares congénitales. D’abord, en ne considérant pas l’école et la santé comme champs prioritaires d’action, IBK
fait une entorse grave et inquiétante à la considération des pouvoirs régaliens de l’État. Ce qui interroge sur l’importance pour lui des questions de fond que pose le M5-RFP, quant à sa gouvernance considérée chaotique par
l’Imam Mahmoud Dicko et ses camarades du M5-RFP.
Ensuite, on ne peut s’empêcher de remarquer la seconde entorse, cette fois-ci au niveau des recommandations du Dialogue national inclusif, quant au respect de la question genre. En effet, pour un mini cabinet qui devrait
démontrer la volonté de changement et le respect du rôle et de la place des femmes dans la gouvernance, IBK et Boubou Cissé ont raté le coche en ne nommant pas une seule femme, alors que la problématique genre est prônée non seulement pour faciliter le dialogue national et la réconciliation des populations, mais aussi pour en faire la pierre angulaire du développement socio-économique.
Diambré Séga

Source : Sud Hebdo

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