IBK : « j’invite mon dôgô, Soumaïla Cissé à mes cotés, comme Bocar Cissé et Boubacar Keïta l’ont, toujours, fait jusqu’à leur mort »

Quelques heures, seulement, après son investiture, nous avons rencontré IBK II, entouré de ses proches, à sa résidence privée de Sébénikoro, transformée pour la circonstance en « lieu de pèlerinage » pour les politicards de tout poil. A quelques jours de la formation du premier gouvernement du second mandat d’IBK, chacun tient à se faire voir. Et à se faire valoir. 


Pour cette première interviou de son second quinquennat, IBK n’y est pas allé avec le dos de la gamelle. Sans concession.

Mr le président, que ressentez-vous 3 heures après votre intronisation, pardon votre investiture, à laquelle plusieurs Chefs d’Etat et de gouvernements viennent d’assister, dans un stade plein comme un œuf ?

Je suis heureux, très heureux. Heureux d’être élu par le peuple malien pour un second mandat. Heureux, aussi, de cette confiance renouvelée que mes concitoyens viennent de placer en moi, pour les cinq prochaines années.

Que répondez-vous à ceux qui disent que votre « pouvoir n’est pas légitime », car vous avez été élu par moins de 2millions de Maliens sur 17 millions ?

Ils le disent parce qu’ils n’ont pas été élu par ces « moins de 2 millions de Maliens ». S’ils étaient à ma place, ils ne parleraient pas ainsi. Mais je suis fier d’être élu président de la République pour un nouveau mandat de cinq ans. Même si, c’est avec 100 Maliens. Cela n’enlève rien à ma victoire, reconnue par la Cour constitutionnelle, mais aussi, par la communauté internationale.

Malgré tout, Mr le président, Soumaïla Cissé, votre challenger, ainsi que d’autres malheureux candidats, à cette présidentielle, refusent de reconnaître votre victoire. Ne sommes-nous pas dans l’impasse ?

Pas du tout ! Je l’ai dit et je le répète : mon jeune frère Soumaïla Cissé doit cesser d’entretenir l’illusion pour gérer le réel. Ses jérémiades et ses marches ne servent à rien. Il doit accepter ma main tendue, afin que nous puissions, tous les deux, conjuguer nos efforts pour redonner à notre pays sa grandeur et sa fierté d’antan.

Pourquoi, selon vous, met-il du temps à accepter votre main tendue ?

Parce qu’il est entouré de personnes, qui le poussent à persister dans l’erreur. Sinon, si cela ne tenait qu’à lui, il serait déjà venu voir son « Kôrô », que je suis et que je reste, pour que nous décidions, ensemble, de la manière, dont nous allons travailler pour sortir le Mali de cette crise qui n’a que trop duré.

Pourtant, Mr le président, vous  et Soumaïla Cissé sont plus proches que les Maliens ne le croient. Votre papa et celui de Soumaïla Cissé étaient très liés. Seule la mort est venue à bout de leur amitié…

Excusez-moi ! (IBK sort un mouchoir de sa poche, essuie ses larmes et réajuste ses lunettes sur son nez). Ce que vous dites est juste. Je ne sais pas d’où vous tirez cette information, mais elle est très juste. De leur vivant, tous les jours, le père de Soumaïla Cissé venait voir mon père sur sa vieille moto camico. Ils causaient toute la journée, mangeaient ensemble. Ils ne se séparaient qu’une fois la nuit tombée.
Quand le père de Soumaïla Cissé s’apprêtait à publier le livre qu’il venait d’écrire, il voulait le faire préfacer par mon père, qui était malade. Gravement. Il ne pouvait même pas s’asseoir, à plus forte raison tenir un stylo entre les doigts. Voilà ce que lui a dit le père de soumaïla Cissé : « Mon ami, mon frère, je sais que tu es incapable de t’asseoir pour préfacer mon livre ; mais je jure, devant Dieu, que ce livre ne sera jamais publié, si tu ne le préfaceras pas ! ». Et quelle a été la réaction de mon père, face aux propos du père de Soumaïla Cissé ?
Mon père a surmonté sa souffrance, en demandant à son ami, Bocar Cissé de l’aider à s’asseoir. C’est ainsi qu’il a préfacé ce livre, que je conseille, d’ailleurs, aux amateurs des belles lettres.

Alors, qu’est-ce qui peut bien empêcher vous et Soumaïla Cissé de vous retrouver, de discuter, de frère à frère, pour vous entendre, comme l’ont, toujours, fait vos papas ?

Honnêtement, je ne sais pas. Mais j’attends, toujours, un signal de sa part. Afin que nous puissions nous retrouver pour parler. Comme l’ont toujours fait Boubacar Keïta et Bocar Cissé, jusqu’à leur mort.

Mr le président, un rapport de l’ONU, élaboré par des experts indépendants, accusent les groupes signataires de l’accord de paix, de s’être livrés à des actes terroristes, de trafic humain, d’exploitation sexuelle des migrantes et de trafic de drogue…
Quel commentaire cela vous inspire-t-il ?

Ce n’est pas nouveau. L’Etat malien a tout fait pour que l’accord de paix soit mis en œuvre. Rien n’y fait. Parce qu’en face, nous avons des personnes de mauvaise foi, que la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale n’arrangeait pas. Ils ne veulent pas de la paix ; mais surtout, du retour des forces armées et de sécurité dans le nord. Retour des forces armées et de sécurité qui pourrait donner un coup de frein au trafic de drogue, d’être humain et au terrorisme auquel nos interlocuteurs se livrent. Quotidiennement.
Maintenant ces faits ont été corroborés par les experts de l’ONU, preuves à l’appui, nous attendons de voir la suite. Une chose est d’identifier les personnes qui font obstacle à la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale. Une autre est de prendre les sanctions adéquates, pour les obliger à respecter leurs engagements.

Mr le président, nous ne pouvons terminer cet entretien sans évoquer l’arrestation de paul Ismaêl Boro et de Moussa Kimbiri, deux membres de l’opposition, interpellés pour, dit-on, « tentative de déstabilisation des institutions de la République »…

C’est une affaire, qui est entre les mains de la justice. Et je n’ai pas le droit de m’y prononcer, en raison de la séparation des pouvoirs.

Et la grève illimitée des magistrats, qui entre dans sa deuxième semaine ?

Aucun commentaire. Du moins, pour l’instant.
Propos recueillis 
par Le Mollah Omar

Canard Déchainé

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