IBK FACE À EMMANUEL MACRON: OBLIGATION D’ATTAQUER OU D’ENCAISSER

Il n’ y a pas d’autre voie, le président français a cherché à crucifier les chefs d’État du Sahel. Toutefois, les citoyens de l’espace n’ont pas été dupes. C’est une aubaine. Il y a donc pour les cinq pauvres convoqués à Pau le 16 décembre une véritable opportunité pour confondre Macron, en tout cas battre à plate couture ses prétentions. 

 

Le président français, dans son agaçante accusation, a particulièrement désigné le Mali et le Burkina Faso, même s’il a pris soin d’affirmer que ce sont tous les cinq chefs d’État impliqués dans le G5 Sahel qui lui ont toujours confié en privé qu’ils étaient pour le maintien des troupes françaises dans leur espace géographique. En ce qui concerne le Mali, IBK a toujours dit du bien des forces étrangères en opération dans son pays. C’est même haut et fort qu’il a constamment réaffirmé cette conviction en parlant sans cesse « d’alliés venus nous aider », « de partenaires indispensables », « de ne pas nous tromper d’adversaires », « de prendre garde à ne pas mordre la main tendue », etc. On voit mal IBK se dédire à Pau. Non, il répétera que les troupes françaises sont souhaitées au Mali dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, tous les terrorismes, ce qui est vrai, à condition que l’engagement soit sincère. Il ne le redira certes pas par conformisme béat ou parce qu’il aura le couteau sous la gorge. Il le dira en fonction de ce qu’il sait en tant que citoyen le plus haut perché, le mieux informé des secrets dont seule la République est dépositaire. Évidemment, IBK n’a pas de prise absolue sur les opinions qui s’expriment ça et là, ceci étant une réalité au Mali comme ailleurs, au Burkina Faso ou au Niger, par exemple. Et l’on ne perdra pas de vue que le 14 septembre de cette même année, Niamey a été le théâtre d’un vaste mouvement d’expressions anti-françaises au terme duquel les populations de cette capitale sahélienne, encadrées par d’importantes organisations de la société civile nationale, ont demandé sans ambages que les Français déguerpissent sans délai. Mais IBK se trouve dans une situation particulière, président plutôt défavorisé comparativement à ses autres homologues mis en procès par Macron, en ce que son pays est le plus central dans l’espace sahélien, donc le plus exposé au terrorisme, avec des frontières des plus poreuses, conséquences nuisibles des opérations françaises antérieures en Libye. Ce n’est pas tout. Le Mali est le seul parmi les cinq pays dont les deux tiers du territoire national se trouvent sous le joug des mouvements armés indépendantistes, lesquels ont été justement soutenus largement par les armées françaises pour opérer et réussir ce hold-up sur un pan entier de la souveraineté nationale du Mali. Cela est indéniable et a été documenté et mis maintes fois en exergue par Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali, qui a d’ailleurs été mis au banc de la diplomatie française pour cette raison. Ibrahim Boubacar Keïta sera tout compte fait en face d’un Emmanuel Macron dont on sait qu’il est une forte tête avec une dose véhémente dans l’offensive. Il l’a montré à l’Assemblée nationale française alors qu’il était jeune ministre. Il a bondi, lors du face à face télévisé du deuxième tour de l’élection présidentielle, comme un lion sur Marine Le Pen qu’il a laminée, à la grande surprise de celle-ci, elle qui est d’ordinaire une tigresse qui se lâche sur les autres politiciens. Avec l’affaire Benalla, on a vu un Macron ironique et méprisant face au peuple en lançant : « C’est moi qu’ils veulent, qu’ils viennent me chercher ! ». Quid des gilets jaunes auxquels il tient tête depuis un an, et aussi des grévistes pour les réformes sur les retraites. C’est face à un personnage extrêmement impétueux que le président aura à s’assumer. Macron, en plus, n’est pas un Africain respectueux des âges. À 41 ans, son épouse a le même âge que IBK, qui compte 74 printemps. Il faut donc au chef de l’État malien d’adopter l’offensive, ou se laisser malmener comme un enfant. Pourquoi Macron ne demandera-t-il pas à Jean Luc Mélenchon, Marine Le Pen, Vincent Ledoux ou Archaux, entre autres, d’arrêter de pourfendre la présence militaire française au Sahel, singulièrement au Mali dont la souveraineté est balafrée? Pourquoi ne fera-t-il pas pression sur l’écrasante majorité des Français hostiles au maintien de leurs soldats dans le Sahel, non sans étaler des soupçons plus nourris et étayés que n’en développent les citoyens du Sahel ? En plus, Emmanuel Macron peut-il s’engager devant le monde à faire libérer Kidal de l’emprise du MNLA et à le ramener sous juridiction absolue du Mali? Telle doit être la ligne à adopter par IBK afin d’éviter de paraître comme un encaisseur consentant. Attitude défaitiste.

Bogodana Isidore Théra

LE COMBAT

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