Assemblée nationale : Aïssata Cissé, dite « Chato », en croisade pour les droits des femmes

Haïdara Aïssata Alassane Cissé, 61 ans, est la première femme politique à diriger un groupe parlementaire au Mali. Parcours et ambitions de l’élue de Bourem, qui place son troisième mandat sous le signe de la promotion des droits des femmes.

 

Le 27 mai dernier, la candidate malheureuse à l’élection présidentielle de 2013, fraîchement élue députée à Bourem pour un troisième mandat consécutif, a marqué de son estampille l’histoire politique du Mali. Elle est désormais la première femme à diriger un groupe parlementaire : « Je ferai en sorte que les femmes aient confiance en elles-mêmes et qu’elles s’engagent beaucoup plus en politique.» 

Cependant, les femmes doivent occuper les postes de responsabilité parce qu’elles ont la compétence, mais pas seulement pour respecter la loi 052 :

« Je mettrai tout en œuvre pour que les femmes parlementaires soient bien formées afin de leur permettre de relever le défi pour le bonheur des Maliens. La femme rurale sera également au centre de nos préoccupations, car elle joue un rôle essentiel au sein de la société », ajoute-t-elle 

De Bourem à Air Afrique

C’est à Bourem, dans la région Tombouctou, qu’Aïssata Alassane Cissé voit le jour, le 26 juillet 1958. Après son baccalauréat obtenu dans la même localité, elle s’envole pour la France où elle obtiendra un diplôme en comptabilité, commerce et marketing.

«Chato», son surnom,  lui a été donné dès son jeune âge par sa grand-mère.

Le visage constamment illuminé par un sourire constant, Haïdara Aïssata Alassane Cissé a servi 17 ans durant  à Air Afrique, la compagnie panafricaine qui a déposé le bilan en 2001. Avant de briguer son premier mandat de députée en 2007, elle était à la tête de son agence de tourisme et de voyage «Wani Tour».

Figure respectée

Belle-fille du premier président de l’Assemblée nationale du Mali, Mahamane Alassane Haïdara, sa mère présidait la section de Bourem de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), le parti unique. Alors que son mari est un député sortant de Tombouctou. « Chato » est une figure respectée dans le paysage politique malien et africain.

En 2010, elle a rejoint le Parti pour le développement économique et la solidarité (PDES), de l’ancien président malien Amadou Toumani Touré (ATT), dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012. Le PDES soutient finalement la candidature de Soumaila Cissé, candidat de l’Union pour la république et la démocratie (URD).

En 2012, pendant l’occupation du septentrion malien par les ex-rebelles du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et une horde de groupes extrémistes violents, elle n’a pas hésité à donner de la voix au plan international pour déconstruire la « stratégie de victimisation »  de l’ex-rébellion. Elle a défendu l’intégrité territoriale du Mali sur plusieurs plateaux de télévision qu’elle a partagés avec les indépendantistes d’alors. Et appelé la France et les États-Unis à intervenir militairement au Mali pour mettre fin à l’occupation djihadiste.

Troisième vice-présidente de l’UM-RDA (Union malienne-Rassemblement démocratique africain) depuis 2014, elle est la 2e vice-présidente du parlement panafricain. Forte de plus d’une décennie d’expérience parlementaire, elle compte imprimer sa marque dans les débats à l’hémicycle.

L’élue de Bourem compte aussi mener à bout le projet de loi sur les violences basées sur le genre, qui traîne dans les terroirs depuis des années à cause de la pression des leaders religieux. « Avec la volonté politique affichée du gouvernement et l’appui de la société civile et des partenaires, je suis sûre que nous parviendrons à adopter cette loi pendant la 6e législature. Les députés de la mandature précédente avaient déjà posé les bases d’examen de cette loi et nous veillerons à son vote », a-t-elle promis.

Un seul projet de loi

Pour certains de ses proches, « Chato » est constamment présente aux côtés des populations de sa circonscription où elle a gagné, dès le premier tour, deux de ses trois mandats acquis : « Banques de céréales, forages, électrification de mosquées, moulins, dons de kits matériels scolaires, elle s’est énormément investie dans le développement du cercle de Bourem », témoigne Abba, ressortissant de Bourem, basé à Bamako.

Cependant, dans son cercle, beaucoup l’accuse de tourner le dos aux populations une fois élue. Pour ces derniers, le développement va au-delà de l’humanitaire : « Durant ses deux premiers mandats, je n’ai pas vu de projet pour la jeunesse dont elle est l’initiatrice. De 2012 à aujourd’hui, la construction du Lycée public de Bourem est arrêtée. Les députés n’ont rien fait pour sa reprise. Aucun projet majeur à part distribuer des vivres aux femmes et offrir des motopompes à certains paysans qui sont pour la plupart de son clan politique », estime ce président d’une association de jeunes à Bourem.

Pour promouvoir davantage le droit des femmes, Haïdara Aïssata Alassane Cissé promet de s’investir plus pour que la loi 052 soit appliquée : « Je souhaite de tout cœur et j’y travaillerai pour qu’à la 7è législature, les femmes représentent 40 à 50% des députés à l’Assemblée nationale », s’engage-t-elle avec l’audace d’une championne de boxe qui met en jeu son titre. Cependant, si « Chato » était active sur plusieurs fronts durant ses mandats écoulés, elle n’a proposé qu’un seul projet de loi visant à indemniser les femmes victimes du conflit au nord du pays. « Le gouvernement l’ayant pris en compte, je l’ai retiré », conclut-t-elle.

Source : Benbere

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