Nucléaire iranien: l’accord de 2015 est-il enterré?

Dans un contexte d’extrême tension avec les États-Unis, l’Iran a annoncé, dimanche 5 janvier, qu’il s’affranchissait de nouveau de certaines de ses obligations prévues dans l’accord nucléaire de Vienne de 2015. Trois questions pour comprendre les conséquences de la décision de Téhéran.

Que signifie la fin de la limitation des centrifugeuses annoncée ce dimanche ?

 Les centrifugeuses sont un élément essentiel de tout programme nucléaire puisqu’elles servent à enrichir de l’uranium, à des fins civiles ou militaires. L’accord sur le nucléaire iranien limite à environ 5 000 le nombre de ces centrifugeuses. Téhéran annonce donc ne plus respecter cette obligation, ce qui en théorie lui permet d’intensifier son activité nucléaire.

Mais ce geste reste mesuré. Téhéran se garde par exemple d’annoncer un taux d’enrichissement de 20% (niveau atteint avant l’accord de 2015), ce qui constituerait une escalade très inquiétante. « Le programme nucléaire de l’Iran continuera désormais uniquement sur la base [des] besoins techniques du pays », précise simplement le communiqué du gouvernement de ce dimanche, sans dire si ces besoins ont augmenté depuis cinq ans.

Jusqu’à présent, la République islamique a toujours indiqué avoir besoin d’enrichir l’uranium à hauteur d’environ 5%, pas plus, niveau suffisant pour produire le combustible nécessaire à la production d’électricité dans une centrale nucléaire. On reste donc encore loin d’un enrichissement à but militaire (90%), nécessaire à la fabrication d’une bombe nucléaire.

Cette décision du pouvoir iranien est-elle liée à l’assassinat du général Qassem Soleimani par les États-Unis ?

Si cette annonce intervient dans un climat très tendu depuis l’assassinat du général iranien en Irak, il n’y a pas de lien direct : cela fait des mois que Téhéran se désengage progressivement de ses obligations. Depuis mai dernier, c’est la cinquième fois que la République islamique s’affranchit de certaines de ses limitations.

« C’est une décision qui avait été prise en amont avant même l’assassinat de Qassem Souleimani, confirme Vincent Eiffling, chercheur associé au Centre d’études des crises et des conflits internationaux (Cecri) à l’université catholique de Louvain. L’objectif de cette stratégie de suspension progressive des engagements vise à mettre la pression sur les partenaires européens, afin qu’ils prodiguent à l’Iran des solutions concrètes pour tenter de maintenir l’économie iranien à flot », face aux sanctions américaines.

Une stratégie qui jusqu’ici n’a pas été payante, les Européens se bornant à appeler l’Iran à revenir pleinement dans le cadre de l’accord de Vienne.

Cette décision est-elle réversible ?

Dans le même communiqué du gouvernement iranien, publié dimanche, celui-ci laisse la porte ouverte à un retour du pays dans l’accord de 2015. « Si les sanctions [réimposées et durcies par les Etats-Unis depuis l’année dernière] sont levées et que l’Iran bénéficie des retombées » attendues de l’accord de 2015, « la République islamique d’Iran est prête à revenir » à l’application pleine et entière de ses engagements.

Téhéran assure aussi que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pourra continuer à contrôler les installations nucléaires.

L’Iran précise que ce cinquième acte de son désengagement est « le dernier », sans dire ce qui pourrait se passer ensuite.

Source : RFI

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