Tapily acculé à la démission?

‘’J’ai été en prison pour avoir libéré la presse au Mali et je suis prêt à y retourner pour débarrasser le secteur privé de la corruption « . Cette phrase, lancée par Mamadou Sinsy Coulibaly devant un parterre de média réunis pour la cause, témoigne à la fois de la gravité de l’accusation qu’il porte contre Nouhoum Tapily et de sa détermination à aller jusqu’au bout de son engagement. Quoi qu’il arrive.

Mamadou Sinsy Coulibaly a accédé au statut du président du Conseil national du Patronat du Mali (CNPM) non pas par la portée dérobée mais par la force de son poignet. L’homme est, en effet, un inlassable créateur de richesse. Il est le promoteur d’une kyrielle d’entreprises évoluant dans des secteurs aussi divers que la presse, l’aéronautique, le tourisme, l’assurance, l’immobilier, les nouvelles technologies, la restauration, le pressing, l’agro-business. Il est souvent décrit comme la plus grosse fortune du pays et l’un des plus importants employeurs après l’Etat.

Un parcours qui lui vaut d’avoir été récemment un récipiendaire des insignes d’officier de l’Ordre National du Mérite français.

» Coulou « -le diminutif par lequel il est couramment désigné par ses compatriotes- serait-il entré en confrontation  directe avec Nouhoum Tapily au détour de l’une de ses nombreuses affaires ? Ou c’est en sa qualité de plus haut représentant du Secteur privé malien qu’il a résolu de réparer un tort fait à ce dernier ?

On se rappelle qu’en février dernier, cet homme réputé nourrir de l’aversion par les passe-droits – une pratique hélas banalisée au Mali – avait fait une sortie médiatique vigoureuse  contre « les 1 600 fonctionnaires qui ont pris en otage le secteur privé« . Promettant de mettre fin à leur emprise néfaste par divers moyens notamment la suspension du paiement  des impôts par les entreprises ou une mise à contribution des chancelleries occidentales pour empêcher ces  » fonctionnaires  véreux de jouir de leurs prébendes  » par l’envoi, par exemple, de leur progéniture dans les universités européennes et américaines.

Cette guerre contre la corruption des fonctionnaires qui dévaste l’économie malienne par la ruine méthodique des entreprises privées censées en être la locomotive entrerait-elle dans sa phase active avec l’attaque en règle contre Nouhoum Tapily, présenté comme « le fonctionnaire le plus corrompu, le plus dangereux, un meurtrier reconnu de tous, un arnaqueur notoire, un racketteur d’entreprises  » ? Et j’en passe.

L’homme accablé de tous ces vilains mots est le président de la Cour Suprême, la plus haute juridiction de l’Etat malien, l’ultime recours vers lequel le citoyen se tourne quand il a tout perdu et qu’il est au bord du désespoir. En plus de veiller au respect des droits et des libertés, elle est le symbole achevé de l’indépendance et de l’intégrité du pouvoir judiciaire.

Aussi son premier responsable doit-il être une personnalité au dessus de tout soupçon. Sans tache et sans reproche.

Le Conseil national du Patronat du Mali a, semble t-il, déjà écrit au Conseil Supérieur de la Magistrature présidé par le président de la République pour réclamer sa démission aux fins de se mettre à la disposition de la justice pour répondre des faits qui lui sont reprochés et non encore dévoilés au public.

Ce serait la meilleure démarche à suivre si ces faits en valent la peine plutôt que de  » garder le profil bas » comme cela le lui aurait été conseillé. Cette attitude équivaudrait à achever de discréditer la justice malienne déjà bien affaiblie par les agissements de ses brebis galeuses. Comme il y en a dans tous les corps de métiers au Mali.

Saouti Haïdara

Source: l’Indépendant

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