Entre Nous : Non à la camisole de la pensée unique

«Au moment où notre pays cherche écoute et convergence pour se bâtir, le débat public prend des tournures inquiétantes. L’invective, l’insulte et l’intolérance face à l’opinion différente ne construiront pas l’unité des cœurs et des esprits dont le Mali a aujourd’hui besoin », a tweeté Dr Ousmane Sy, ancien ministre de la République.

 

Ousmane Sy a raison à juste titre. Le débat public a pris des tournures inquiétantes. Face aux opinions différentes, ce sont des invectives, des insultes et de l’intolérance. Et cela s’est véritablement accentué depuis le début de la phase dite de « rectification » de la transition. Tous ceux qui ne partagent pas la vision des autorités actuelles ou émettent des avis contraires à leurs déclarations sont insultés, vilipendés comme si un bataillon de lynchage a été mis en place sur les réseaux sociaux. Ils sont traités d’ennemis du Mali, des traîtres de la 5e colonne, des apatrides ou encore des agents de telle ou telle puissance. Il faut être du côté de tenants actuels du pouvoir ou se taire. L’actuel gouvernement de transition issu des forces qui se disent « du changement » veut imposer une camisole de la pensée unique. Les menaces, les intimidations et toute tentative d’instrumentalisation de l’appareil d’Etat à des fins inavouées sont vouées à l’échec.

Hier, ils étaient prompts à dénoncer de tels manquements aux libertés fondamentales, mais aujourd’hui ils ne sont nullement dérangés. Plutôt, ils sont à la manœuvre pour les perpétuer ou les aggraver. Non, la gouvernance de rupture ne s’accommode pas avec de telles pratiques. Non, le nouveau Mali clamé urbi et orbi ne s’accommode pas avec de telles entraves à l’exercice des libertés publiques. Il y a une volonté manifeste de remettre en cause des acquis obtenus de haute lutte par le peuple depuis plusieurs décennies. Nous disons non. Non et non ! Car, personne n’a le monopole du patriotisme.

Des citoyens n’ont pas bravé tous les dangers sous IBK pour voir le Mali basculé dans la promotion de la pensée unique. Des jeunes gens n’ont pas donné leur vie pour que certains responsables puissent se permettre de violer allégrement les textes ou instrumentaliser l’appareil d’Etat à des fins de règlement de compte.

Ceux qui s’adonnent à de telles pratiques doivent se rappeler qu’ils peuvent en être victimes demain. La roue de l’histoire tourne. Hier, ceux qui étaient aux commandes du pays sont aujourd’hui dans l’opposition. Et ceux qui criaient au Boulevard de l’Indépendance ou sur des chaînes de télévision sont actuellement aux affaires. Le faible d’aujourd’hui peut devenir le puissant de demain. Comme le puissant peut aussi devenir le faible. Dans un pays comme le Mali où tout peut arriver à tout moment, il faut s’abstenir de certaines pratiques quand le hasard a voulu que vous soyez à la tête.

Le Mali n’a pas besoin d’insultes, d’invectives ou d’intolérance, mais plutôt d’union sacrée de l’ensemble de ses fils. Cette union des cœurs et des esprits ne peut pas naître des intimidations ou des menaces visant à faire taire les voix discordantes qui refusent d’adouber des discours et autres prises de position populistes. Le gouvernement de transition gagnerait à rassembler plutôt que de s’adonner à des pratiques qui nous éloignent de l’essentiel.

Par Chiaka Doumbia

Source : Le Challenger

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