AUTREMENT DIT: La discourtoisie jusqu’au bout…

Comment une lettre confidentielle adressée au ministre de la Défense et des Anciens combattants du Mali, le Général de Division Dahirou Dembélé, par son homologue du Burkina Faso, le ministre d’Etat Moumina Cherif Sy, marquée du sceau «confidentiel», s’est retrouvée dans la rue, sur les réseaux sociaux, dans tous les endroits publics que l’on peut citer ?

 

C’est la question que se posent nombre de Maliens en ce moment ; oubliant, malheureusement, que l’on vit dans un pays comme le Mali. Oui, malheureusement, c’est au Mali que nous vivons et, dans ce pays, depuis quelques années désormais, rien n’est confidentiel, ce qui doit être important ne l’est plus.

Personne (surtout pas nos autorités) ne fait la différence entre ce qui doit être mis, porté sur la place publique, ou pas ; un pays où chacun se croit tout permis ; dans lequel l’impunité a pris le pas sur tout, un pays dirigé par des personnes et personnalités surprises par les responsabilités, non préparées à cela.

Ainsi, il y a quelques jours de cela, l’armée malienne a effectué une opération des plus regrettables et déplorables au-delà de nos frontières, sur le territoire burkinabè. Et, comme le dit la lettre plus que courtoise (heureusement, d’ailleurs, pour qui connaît M. Moumina Cherif Sy), elle a terrorisé des citoyens de ce pays ami, écrasé de pauvres paysans, arrêté des innocents, traité comme des terroristes qu’ils ont transportés au Mali et, tout cela, sans en informer nos voisins auxquels on ne peut, fondamentalement, rien reproché en termes de collaboration et ni de soutien à la lutte contre le terrorisme.

Au départ, et c’est ce qui est le plus incompréhensible et extrêmement malhonnête, avant la réaction du gouvernement burkinabè, cette opération, sans que l’on ne sache pourquoi, a été présentée, ici, au Mali, comme «une opération réussie de lutte contre le terrorisme», qui a «permis d’interpeller de dangereux individus», etc.

Pire, le lieutenant qui a conduit cette irruption chez nos voisins, un certain Diakité, a été présenté comme un héros alors qu’il n’a malheureusement «procédé qu’à une répression contre les populations du village de Abbaye, occasionnant ainsi trois morts, dont un broyé par les roues de véhicule ; des destructions massives d’infrastructures et de matériels».

Comme le précise la lettre confidentielle du ministre d’Etat burkinabè, qui nous apprend aussi qu’au cours de la même intrusion : «Plusieurs personnes auraient été arrêtées et transférées au Mali et le reste de la population de Abaye terrorisé par cette répression s’est réfugiée à Kombori dans un dénuement total».

Sans être dans les secrets d’aucun Dieu, on peut, facilement, imaginer que cette lettre a été adressée, en premier, au ministre et, peut-être même, par version électronique, avant la copie dure. Et comment a-t-elle fuitée ?

Les auteurs d’une telle discourtoise doivent en répondre, à commencer par le ministre de la Défense lui-même. Que certains de ses hommes ne puissent pas, convenablement, défendre nos frontières, que certains désertent les postes, que d’autres fondus dans une foule de manifestants s’en prennent à nos amis français, tout cela peut se comprendre, à la limite. Mais, qu’ils terrorisent de pauvres populations d’un pays voisin, cela est totalement incompréhensible, inexcusable et mérite des sanctions sévères.

Makan Koné

Source : Nouvelle Libération

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