Système de tarification de l’énergie électrique : La nécessaire réadaptation

Il est impératif de repenser à un système de tarification de service public d’électricité qui tient compte de la transition énergétique et dont l’impact est moins sur la balance des paiements et les finances publiques du pays.

 

La politique tarifaire doit permettre d’assurer l’équilibre économique et financier du service public. L’ensemble des coûts de la chaine de service d’électricité doit être couverts par l’ensemble des recettes. Comme tout marché, le prix de l’électricité obéit à la loi de l’offre et de la demande du marché. Quand il y a beaucoup d’électricité produite et moins de demande, les prix sont bas et quand il y a moins d’électricité produite et beaucoup de demande les prix forme des pics.

Au Mali, les tarifs d’électricité sont issus d’une politique nationale de régulation tarifaire de type dual (présence de deux régulateurs). Les tarifs des concessionnaires (assimilés au milieu urbain) sont régulés par la Commission de Régulation d’Electricité et de l’Eau (CREE) qui est une Autorité indépendante et dotée de la personnalité juridique et de l’autonomie financière. Elle a pour missions d’assistance à l’élaboration de la politique de développement et de planification du secteur, l’approbation et contrôle des tarifs, le contrôle et le suivi des conventions et des transactions entre opérateurs dans le secteur de l’électricité, l’arbitrage des conflits entre opérateurs et entre opérateurs et maîtres d’ouvrages et de défense des intérêts des usagers.

Les tarifs des permissionnaires (operateurs électrification rurale) sont fixés par l’Amader qui est un établissement public à caractère administratif doté d’une personnalité morale et d’une autonomie financière. Elle a pour mission le développement de l’énergie domestique et de l’électrification rurale. Les tarifs en milieu rural sont basés sur le principe de coût budgétisé et de la liberté tarifaire.

Le principe de tarification en milieu rural bien que contraire aux principes de l’équité sociale et d’égalité de traitement tarifaire entre les usagers de EDM–sa et ceux des opérateurs privés ruraux, reflète mieux la vérité des prix en dehors de toute subvention d’exploitation.

Dans les zones urbaines, le tarif est régulé aux environ de 120 FCFA/ kWh à cause de la subvention publique à l’exploitation qui compense le différentiel de coût de production thermique d’électricité par rapport à l’hydroélectricité. Le tarif moyen d’EDM-SA non subventionné est de 172,4 FCFA/kWh nettement inférieur au tarif moyen des permissionnaires de l’électrification rurale qui est de 280 FCFA/kWh. Le tarif d’équilibre sur l’ensemble du territoire national est estimé à 176,1 FCFA/kWh, ce qui est supérieur au tarif moyen de l’EDM SA.

Dans les zones rurales sous la régulation de l’Amader, les opérateurs privés de réseaux électriques appliquent les tarifs ordonnés par la réalité des coûts supportés selon la source  production. Les tarifs fixés à 150 FCFA/ kWh pour le mode de production hybrides (Solaire/diesel) et 250 FCFA/ kWh pour le mode de production thermique.

Malgré que ces tarifs soit jugés élevés par les usagers, ils ne reflètent pas la réalité du prix du service d’électricité. Les missions des services publics ne parviennent pas à appliquer entre elles une véritable tarification sociale. La tarification en vigueur constitue un lourd fardeau pour les finances publiques, un déséquilibre pour la balance de paiements et du secteur de l’énergie électrique.

Le paradoxe au cœur de la viabilité de l’industrie électrique est son mode de gestion qui concilie la rentabilité des investissements lourds qui intervient à long terme et le service d’intérêt général, soumis à de forte sensibilité sociale au prix. L’on se trouve devant un dilemme avec la position permanente de l’Etat, à la fois propriétaire principale et client principal.

Cela a pour conséquence direct de mettre en mal le fonds de roulement et les programmes d’investissements par l’alternance d’un style de management de connivence et de performance. Ce qui ne rend pas facile la tâche de régulation du secteur dans la mesure où l’Etat conserve certaines prérogatives réglementaires sur la fixation des tarifs.

Tenant en compte des enjeux économiques, sociaux, d’intégration du marché de l’électricité et de transition énergétique, les tarifs d’électricité dans de nombreux pays sont déterminés à partir des éléments suivants : la consommation d’énergie (kWh), les coûts d’investissement, de gestion du réseau de distribution et services connexes, les diverses taxes et redevances des instances publiques et la taxe de soutien à la transition énergétique.

Cette taxe de soutien à la transition énergétique vise à corriger les externalités des énergies fossiles. Elle constitue dans nombreux pays l’une des sources de financement interne et pérenne pour la réalisation des grands projets d’investissement d’énergie renouvelable et un levier de mobilisation des financements externes pour le secteur de l’électricité.

Au Mali, il n’existe aucun mécanisme de mobilisation de ressource interne pérenne pour le financement des infrastructures structurantes dans le cadre de la transition énergétique. Il est impératif pour le pays de repenser à un système de tarification de service public d’électricité pouvant assurer l’équilibre du secteur de l’énergie dans le cadre la transition énergétique.

En résumé, la tarification doit être orientée vers le bon usage de l’électricité, la réduction de la part de l’énergie fossile dans le mix énergétique, l’amélioration de la balance de paiements, des finances publiques et la réduction du chômage. C’est à travers cela que nous pouvons atteindre les objectifs de la régulation tarifaire notamment l’équilibre du secteur et la protection de l’intérêt des usagers actuels et des générations futures.

Dianguina Bathily

Diplômé en Management et finances publiques

66 72 63 66

Source : Mali Tribune

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