BANQUES : La BMS SA face à la dure vérité du droit

C’est un secret de polichinelle, la banque malienne de solidarité est l’ombre d’elle-même depuis un certain temps. Les difficultés se suivent mais ne se ressemblent pas. Et le tout joue contre l’institution dirigée par Alioune Coulibaly.

 

Jadis un fleuron, la banque malienne de solidarité traverse des moments pas fameux. L’on se rappelle il y a quelque temps des bruits qui se faisaient avec l’arrivée de M Coulibaly à la tête de la banque. On lui reprochait d’avoir favoriser ses anciens collègues de la BHM au profit des cadres de la BMS-SA. Une guerre de clan qui avait poussé certains cadres à ne pas donner le meilleur d’eux quant aux objectifs à atteindre.  Sur un autre plan, l’affaire qui l’oppose à la Société ivoirienne de concept et de gestion risque de créer de grands soucis à la banque.

En effet, le tribunal de commerce de Bamako a statué plusieurs fois dans le litige qui oppose BHM SA devenue BMS SA. Ce qui est troublant dans les décisions dudit tribunal se sont les contradictions de ses jugements.

1/ Le 11 Octobre 2004, par Ordonnance N° 118, le tribunal condamnait la BMS SA, alors BHM SA, a justifié les versements effectifs sur le compte de SICG MALI des 14 milliards de recettes perçues pour le compte de cette société. Cette décision était assortie d’une astreinte de 500 000 fcfa par jour. La cour d’appel de Bamako par arrêt N° 91 du 21 avril 2006 confirmera l’ordonnance N° 118 du 11 Octobre 2004.  Sur cette 1ere décision du tribunal de commerce de Bamako, la BHM SA devenue BMS SA n’a toujours pas justifié les versements de 14 milliards. La CCJA confirmera que la BMS SA n’a pas justifié les versements pour 14 milliards le 14 mars 2019.  Au titre des astreintes, la BHM SA devenue BMS SA va devoir payer à la SICG Mali des astreintes de 500 000 fcfa par jour depuis le 11 octobre 2004 à ce jour. Cela représente environ 2,800 milliards.

Cependant le 11 juin 2005, par jugement N° 215, le tribunal de commerce de Bamako ordonnera une reddition des comptes entre BHM SA devenue BMS SA et SICG Mali.

La CCJA confirmera ledit jugement dans son arrêt du 14 mars 2019. La BHM s’opposera audit jugement. Elle a été soutenue dans sa démarche par le Vérificateur et le Contentieux de l’Etat. Une banque qui s’oppose à une reddition de comptes ? C’est rarissime.  La Cour d’Appel de Bamako fera de même le 9 Février 2011.

Mais la CCJA suivra le jugement du 11 Juin 2005 du tribunal de commerce présidé à cette époque par Mr Thera Fatogoma entérinant la reddition des comptes. Le 12 mai 2008, la BHM SA établira 2 Etats de Créances N° 1 et N° 2 respectivement de 6, 866 milliards et de 1,837 milliards au nom de SICG Mali et de SICG Habitat.

Les SICG contesteront les 2 Etats de créances de BHM SA devant le Tribunal de commerce de Bamako.   Le 17 juillet 2008, par ordonnance N° 96, le tribunal ordonnera, pour une bonne administration de la justice, la discontinuation des poursuites contre SICG Mali et SICG Habitat et ce jusqu’à intervention d’une décision définitive sur l’instance de reddition de comptes entre les parties pendante devant la cour d’appel.

En clair, pour le tribunal de commerce, les 2 Etats de créances établis par BHM SA n’ont pas de fondements tant que la reddition des comptes n’avait pris fin.  C’est chose faite depuis le 14 mars 2019 par la décision de la CCJA.

En clair, les états de créances de BHM SA devenue BMS SA sont devenues caducs. Cette décision du Tribunal de Commerce du 17 juillet 2008 n’a jamais été contestée par la BHM SA devenues BMS SA. D’où la surprise de la SICG MALI de voir la BMS SA les produire à nouveau pour établir une Note de Compensation le 30 Juillet 2019 au mépris de cette décision judiciaire.

Un Hold Up ?

Mieux, de constater que le Tribunal de commerce de Bamako qui a ordonné la discontinuation des poursuites le 17 juillet 2008 sur la base des états de créances de le voir les prendre en compte, alors que l’Ordonnance N° .96 du 17 juillet 2008 n’a pas été annulée. Le tribunal du commerce a-t-il perdu sa mémoire et sa boussole ?

Certains hommes de droit plus avertis se demandent comment ce déni de justice a-t-il pu arriver dans notre pays ? En effet le 30 Octobre 2019, au mépris de sa propre décision qu’il a lui-même prise le 17 Juillet 2008 et de l’’Article 20 du Traité selon lequel dans l’espace OHADA aucune décision contraire à un arrêt de la CCJA ne peut être appliquée, le Président du Tribunal de commerce décidera de donner une suite à la demande de compensation de BMS SA basée sur les états de créances que son tribunal a suspendus depuis le 17 juillet 2008. Ainsi, le 30 octobre 2019,   ‘’ le Tribunal Statuant publiquement, contradictoirement, en matière Commerciale et en premier ressort; En la forme : rejette comme inopérantes les exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité soulevées par la défenderesse, par contre reçoit les demandes tant principales que reconventionnelles des parties ; Au fond : déclare l’assignation de la demanderesse justifiée ; En conséquence ordonne compensation entre la créance de la BMS-SA et celle de la SICG-MALI et, partant déclare éteintes les dettes réciproques des parties jusqu’à due concurrence des quotités respectives, conformément à la note de compensation du 25/07/2019’’.

En statuant de la sorte, le Président du Tribunal de commerce, a décidé de son propre chef d’éteindre une créance née d’une décision communautaire, à savoir l’arrêt CCJA  068/2019 du 14 mars 2019 condamnant la BMS SA à payer à SICG MALI la somme de 16,707 milliards de nos francs nonobstant les intérêts depuis janvier 2004.

Cet arrêt de la CCJA vient ainsi mettre définitivement un terme au litige entre BHM SA devenue BMS SA et SICG MALI.

Par sa décision nationale, le juge déclare ainsi éteinte une créance née d’une décision communautaire.

Il aurait inversé les pouvoirs par un coup d’état judiciaire, a laissé entendre un observateur du dossier.

Autre chose il ressort que le juge aurait statué ultra petita. En effet la BMS par son assignation a demandé de lui donner acte de ce qu’elle a procédé à la compensation et non d’ordonner la compensation.

Mais le tribunal, au lieu de lui en donner acte, a outrepassé la demande à lui soumise par BMS SA pour ordonner la compensation.  Il y a là un motif d’annulation de son jugement de fait outre les autres moyens violations des règles de droit évoqués plus haut.

Quant à la SICG Mali avait aussi demandé au Juge de surseoir à statuer jusqu’à ce que le Tribunal Administratif et la Section Administrative de la Cour Suprême statue sur la demande de compensation et sur la validité des états de créances de BMS au motif qu’elle les avait établis comme en matière d’impôts. Autre incongruité de ce jugement selon un spécialiste en droit fiscal, le juge a violé le Livre de Procédures fiscales (LPF) et le Code des Obligations de notre pays. En ce qui concerne, le LPF, la compensation n’existe pas et les états de créances sont prescrits. Le juge aurait dû se déclarer incompétent.

Concernant le code des obligations, la compensation peut se faire uniquement entre 2 parties. Or, on a innové en faisant une compensation triangulaire entre 3 entités ayant chacune ses propres statuts et RC (BMS, SICG Mali et SICG Habitat).

A-t-il décidé de fusionner les 2 SICG de son propre chef ?  Que dire de la violation de l’article 116 de notre constitution par le juge et qui réaffirme l’autorité supérieure des traités (tel que le Traité de l’OHADA) sur les Lois de notre pays.

Tous ces faits risquent de jouer contre la BMS -SA dans les jours à venir, surtout quand l’affaire sera à nouveau en face de cour de la justice et d’arbitrage, qui va certainement faire le ménage.

Affaire à suivre

Source : EchosMedias

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