Manuscrits anciens : une politique nationale en gestation

Les manuscrits constituent une composante essentielle du patrimoine culturel du Mali. En même temps que d’autres éléments du patrimoine culturel, ces documents précieux ont fait l’objet de destruction et de pillage de janvier 2012 à avril 2013. C’était pendant l’occupation des régions du Nord du pays par des groupes armés.

Ce qui s’est traduit par d’importants dégâts causés au patrimoine culturel du pays et les manuscrits anciens n’y ont pas échappé. Environ 4.203 manuscrits du nouveau bâtiment de l’Institut des hautes études et de recherche islamiques Ahmed Baba (IHERI-AB) ont été détruits ou volés.

Les communautés locales organisées autour de l’ONG SAVAMA-DCI (Sauvegarde et valorisation des manuscrits anciens pour la défense de la culture islamique), qui constituent un réseau des propriétaires de bibliothèques privées, ont pu exfiltrer de Tombouctou dans les conditions précaires, près de 95% des manuscrits anciens de la région, dont 22.450 de l’IHERI-ABT, grâce à l’appui technique et financier de nombreux partenaires. Qu’ils en soient remerciés.

Le présent atelier, qui se tient depuis lundi dernier au Centre international de conférences de Bamako, est organisé par le ministère de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, en partenariat avec le Bureau UNESCO de Bamako, l’Union européenne et l’ambassade d’Espagne.

L’atelier national de réflexion sur l’implémentation d’une politique de préservation, de gestion, de valorisation et de promotion durable des manuscrits anciens du Mali a pour but de mener une profonde réflexion, de diagnostiquer les multiples menaces auxquelles les manuscrits anciens sont confrontés. Pour le ministre Andogoly Guindo, il s’agira de proposer des stratégies adéquates et durables pour la sauvegarde, la conservation et la mise en valeur des manuscrits. L’atelier est également l’occasion d’une prise de conscience de la nécessité et de l’urgence de sauvegarder, de gérer, de valoriser et d’exploiter les manuscrits anciens à travers l’implémentation d’une politique, dont les participants définiront les contours au cours de leurs travaux.

Les participants réfléchiront sur les voies et moyens de contribuer au renforcement de la gestion, de la sauvegarde, de l’accessibilité et de la valorisation des manuscrits anciens en vue d’améliorer l’accès universel à la connaissance sur l’histoire écrite de l’Afrique et faciliter l’ancrage institutionnel. Il permettra aussi de renforcer les capacités des acteurs pour la sauvegarde, la gestion et la valorisation des manuscrits anciens en capitalisant les résultats des travaux antérieurs au plan national. Dont ceux de la dernière consultation internationale sur les manuscrits anciens au Sahel et le rapport d’études de l’UNESCO en 2020 sur les manuscrits anciens du Mali ainsi que l’expérience en la matière d’autres pays de l’Afrique particulièrement le Maroc, l’égypte et la Tunisie.

L’atelier contribuera au renforcement du cadre législatif, juridique, administratif et institutionnel permettant de définir le rôle et le statut des manuscrits anciens, des collections et bibliothèques, des détenteurs et familles détentrices de manuscrits et de lutter contre le trafic illicite des manuscrits anciens.

Enfin ce sera l’occasion de proposer une esquisse de document de politique de sauvegarde, de gestion et de valorisation durable des manuscrits anciens et un plan d’actions intégrant les questions législatives et règlementaires ainsi que l’ancrage institutionnel et les stratégies de mobilisation de ressources en faveur des manuscrits anciens.

L’ambassadeur d’Espagne José Hornero Gomez a rappelé l’engagement de son pays à aider notre pays à favoriser la recherche scientifique autour de ces précieux patrimoines que constituent les manuscrits anciens. C’est pourquoi, l’Espagne aide à la réalisation d’une importante exposition itinérante en Afrique et en Europe permettant de faire mieux connaître les manuscrits du Mali. Bart Ouvry, ambassadeur de l’UE au Mali, a insisté sur l’apport économique des manuscrits anciens. Le processus de conservation et de valorisation contribue à la mise en place d’une économie culturelle.

Notre patrimoine constitue un atout majeur de développement économique et social des communautés et des pays au service de la paix. C’est pourquoi, dira Edmond Moukala, le chef du Bureau de l’UNESCO au Mali, «ce patrimoine n’est pas à détruire, mais mérite d’être protégé et valorisé pour les générations futures». Le patrimoine culturel du Mali est un joyau, dont la protection incombe à l’ensemble de l’humanité, avant d’ajouter que «ce patrimoine est notre bien commun».

Youssouf DOUMBIA

Source: Essor
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