AIDE AU DEVELOPPEMENT : Une stratégie néocoloniale pour maintenir l’Afrique dans la misère sous perfusion occidentale

Qu’est-ce qui manque à nos Etats ? La volonté politique, l’audace… Donc une vraie vision politique. Il ne s’agit pas de ces politiques conçues et pilotées de l’extérieur parce que nos dirigeants sont incapables d’aller vers des financements innovants, plus contraignants, mais respectueux de notre souveraineté. C’est pourquoi il est révoltant de voir encore nos dirigeants (à l’image de Félix Tshisekedi à sa sortie de l’Elysée le mardi 12 novembre 2019) aux Anges quand la France ou une autre puissance leur promette des miettes en contrepartie de l’exploitation abusive de nos richesses.

A l’issue d’une rencontre avec son homologue congolais Félix Tshisekedi, le président français Emmanuel Macron a annoncé que son pays allait aider la RDC à hauteur de 65 millions d’euros dans le cadre d’un contrat de développement et de désendettement du pays.

On comprend alors aisémen pourquoi Félix Tshisekedi était si heureux au moment de quitter l’Elysée comme un enfant qui vient de voir le Père Noël avant la fête de la nativité. Cela se comprend de la part d’un dirigeant qui, en septembre dernier confiait à la presse française, que «depuis ma plus tendre enfance, j’ai toujours aimé la France, l’équipe de France. Mon club favori, c’est le Paris Saint-Germain». Et cerise sur le gâteur, «Paris va accompagner le travail de modernisation et de transformation entrepris par Félix Tshisekedi», a annoncé Emmanuel Macron si sûr et fier de son coup.

La France va d’abord aider le pays à lutter contre les groupes armés, notamment à l’Est. La coopération se fera en matière de renseignement, mais elle sera aussi militaire. Paris entend également mener une action diplomatique dans le cadre des Nations unies, pour sanctionner les leaders de ces groupes. Sur ce volet sécuritaire, Emmanuel Macron a dit souhaiter que tous les pays de la région s’engagent au côté du président congolais, et en particulier le Rwanda et l’Ouganda. Qu’elle est la contre partie ?

Félix Tshisekedi et Emmanuel Macron ne vous le diront pas. Mais, les Congolais ne sont pas naïfs pour croire que la France va voler à leur secours sans concession aucune. Et ils savent que Macron veut contribuer à la sécurisation de leur pays parce que la France lorgne sur des parts importants dans la reconstruction du pays.

Sans compter que la République démocratique du Congo est un immense pays riche avec une population en pleine croissance (en plus d’être le plus grand pays francophone du monde, c’est aussi un gigantesque marché pour les industries françaises), des richesses naturelles et minières inestimables dans une région (région des Grands Lacs) où la France est en perte de vitesse diplomatique depuis que Paul Kagame est aux affaires au Rwanda. Et elle veut avoir Félix Tshisekedi dans la poche avec l’aide au développement comme appât.

 

Des «Mendiants» complexés et indifférents à leur force

C’est révoltant de voir nos dirigeants aller quémander des aides financières à des pays qui s’enrichissent avec nos richesses. Sans démagogie aucune, qu’est-ce que la France aujourd’hui sans ses ex-colonies qu’elle continue de piller par toutes les manières ?Ce n’est pas un fait du hasard si ses dirigeants sont allergiques au débatsur le franc CFA qui est un pilier de la puissance financière de leur pays.

Ainsi, l’Elysée et ses services étaient en émoi, il y a quelques jours, lorsque le président béninois Patrice Talon (Invité de France 24 et RFI) a annoncé le retrait des réserves de change du franc CFA qui se trouvent en France. Ce qui, pour les observateurs, est «un pas de plus vers la disparition de cette monnaie». Mais, l’agitation de la «Macronie» se comprend aisément puisque c’était la première fois qu’un chef d’Etat parle ouvertement de la question des réserves de change que les pays de la zone CFA déposent à la Banque de France. «Une déclaration qui anticipe sur quelque chose d’inéluctable : la disparition du franc CFA» !

Cette sortie inquiète parce que le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, avait martelé que «nous restons ouverts à une réforme ambitieuse du franc CFA à une condition : C’est que la proposition vienne des États membres de la zone franc». Or, justement, le président Patrice Talon vient de l’évoquer ouvertement pour la première fois. Economiquement, la France à tout à perdre dans la disparition du franc CFA comme dans la révision de ses rapports économiques et diplomatiques avec ses anciennes colonies.

«C’est un tabou qui est brisé, mais qui est en réalité inéluctable. De la même façon que la fin du franc CFA est inéluctable, il fallait bien commencer par quelque chose. Et je pense que les réserves sont l’élément le plus saillant et qui cristallisent le plus les attentes. Donc, c’était fatal qu’on en arrive là», a confié à RFI quelques jours plus tard l’économiste Martial Ze Belinga.

En tout cas l’aide au développement n’est qu’un mirage pour entretenir l’illusion que nous ne sommes rien sans les puissances occidentales, notamment la France. Et curieusement, c’est le contraire qui est une réalité. Que serait la France sans les pays africains, et surtout maintenant qu’elle est en récession économique avec ses conséquences sociales qui sont en train d’ébranler la République ?

L’aide financière extérieure, telle conçue par les puissances impérialistes depuis l’indépendance de nos Etats, n’a aucun impact sur notre développement. Bien au contraire, c’est un goulot d’étrangement, une hypothèque de notre souveraineté parce qu’elle nous tient à la merci de ces pays qui ont ainsi carte blanche pour exploiter et exporter nos richesses à leur convenance pour maintenir leur industries sur une dynamique de croissance.

Ce dont l’Afrique a aujourd’hui besoin, ce sont de dirigeants courageux et audacieux comme Paul Kagamé ou Evo Morales qui diront niet aux anciennes puissances coloniales ainsi qu’aux Institutions de Bretton Woods. Nous avons les richesses et les ressources humaines pour les mettre en valeur. Il suffit de les décomplexer et de créer les conditions d’épanouissement de nos compétences.

Pourquoi par exemple continuer à exporter nos matières à l’état brut ? Pourquoi continuons-nous à accorder des exonérations aux multinationales et aux sociétés minières alors que ce sont elles qui ont besoin de nos ressources pour ne pas faire faillite ? Pourquoi ne pas prendre l’Occident à son propre jeu : le libéralisme ! C’est-à-dire fixer nous-mêmes les conditions de l’exploitation et de l’exportation de nos ressources. Exiger l’implantation des industries intermédiaires (Partenariat Public-Privé) afin de créer de la valeur ajoutée pour impulser la croissance économique et l’épanouissement social de nos populations !

Pour ce faire, il faut sortir des relations Etat-Etat dans les secteurs clés du développement économique pour céder la place à un secteur privé qui doit être plus agressif, plus entreprenant, donc moins complexé.

C’est de cela que l’Afrique a besoin et non de continuer à tendre la sébile pour quémander des miettes accroissant notre vulnérabilité politico-économique vis-à-vis de ses «amis» qui n’ont aucun intérêt à ce que nous puissions voir le bout du tunnel un jour.

L’Afrique a besoin de partenariats respectueux, mais pas d’aide !

Moussa Bolly

LE MATIN

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